L’artiste visuel haïtien Manuel Mathieu était l’invité de l’émission “Carel in the Morning” le jeudi 13 mars 2025. Lors de cette entrevue, il est revenu sur son parcours artistique et a dévoilé un projet inédit : une collection de parfums intitulée “Dsire, Île Noire et ECCCO”, composée de trois fragrances. Le peintre a également annoncé plusieurs expositions cette année, ainsi que l’installation permanente de cinq mosaïques monumentales de 18 pieds à la station de métro Édouard-Montpetit, à Montréal.
Manuel Mathieu a grandi dans un univers artistique, influencé par sa mère, collectionneuse de tableaux. Il a découvert l’art à 15 ans en Haïti, notamment grâce à Mario Benjamin, un membre de sa famille, qui lui a offert des livres et des catalogues. Cette ouverture sur le monde de la création a nourri son envie de s’exprimer à travers l’art visuel abstrait, la sculpture, la peinture et le cinéma.

« Lespri se yon espas ki enfini, se pou sa mchwazi viv de sa la p pèmèt mw kreye », a-t-il confié.
Il a également collaboré avec le photographe Stevenson Roberto, s’initiant ainsi à la photographie et au développement en chambre noire.
À 19 ans, en 2006, Manuel Mathieu quitte Haïti pour les États-Unis. Il y poursuit ses études et obtient un certificat en marketing avant de s’installer à Montréal, où il se confronte à un manque de représentation des artistes haïtiens. Malgré les difficultés, il s’impose dans le milieu artistique et devient le premier Haïtien à intégrer une institution culturelle majeure de la ville, où il occupera même la présidence avant de quitter récemment ses fonctions.
En 2018, le Musée des beaux-arts de Montréal acquiert l’un de ses tableaux, une première pour un artiste haïtien. Ce succès le pousse à créer le Fonds Marie Solange Appolon, du nom de sa grand-mère, afin de soutenir l’acquisition d’œuvres d’artistes sous-représentés dans les collections muséales.

Il poursuit ensuite ses études à Londres et expose à Bruxelles, Londres et Montréal. Son travail s’inscrit dans une dynamique internationale, tout en maintenant des liens avec Haïti. « Pou mw art son zouti ki pemet mw touche plizye pwen. Mw itiliz langaj pou rakonte istwam, tout sa ki antoure m », a-t-il expliqué.
Ses œuvres lui valent plusieurs distinctions, dont la Médaille du roi Charles III en 2024, le prix du Meilleur court-métrage pour “Pendulum” au Festival international du film sur l’art en 2023, le Prix Sobey pour les arts au Canada en 2020 et le titre de “Visual Artist of the Year” au Gala Dynasty.

Lors d’une résidence d’artiste à Paris, Manuel Mathieu rencontre Christine Nagel, parfumeuse chez Hermès, qui l’initie à l’univers olfactif. Il approfondit ensuite ses connaissances auprès de Juliette Karagueuzoglou, parfumeuse chez IFF (International Flavors and Fragrance).
Inspiré par le vétiver haïtien, il développe “Île Noire”, un parfum aux notes de vétiver, tabac, ambre gris et jasmin. Après plusieurs mois de recherche, il enrichit cette première création avec “ECCCO” et “Dsire”. Chaque fragrance s’inscrit dans une démarche artistique globale, du design des bouteilles, qu’il a lui-même sculptées, jusqu’au concept narratif de la collection. « M vle kreye parfum pou lòt jenerasyon an », affirme-t-il.

Le lancement de la collection est prévu dans un mois, avec des présentations à Paris, New York, Los Angeles, Montréal et Toronto. Les amateurs peuvent suivre son évolution sur Instagram : https://www.instagram.com/manuelmathieuparfums?igsh=ZHMxZTFydmlhZ2Rx.
En parallèle, Manuel Mathieu continue de mettre en avant les œuvres d’artistes afrodescendants à travers le projet “Ciné causerie”. Son année 2025 sera marquée par plusieurs expositions et l’installation de ses mosaïques monumentales à Montréal, un projet qui ancre son travail dans l’espace public tout en poursuivant sa quête de nouvelles formes d’expression.
Regardez l’interview complète de Carel Pedre avec Manuel Mathieu sur la chaîne YouTube de Chokarella ci-dessous
Par Ann-Olguetty Loodjenny Dieuve © Chokarella