Le photographe Carvens R. Alderson a obtenu une mention spéciale pour son projet photographique intitulé «L’ Écho des mythes en Haïti », dans le cadre du Fonds pour la photographie émergente en Haïti. Cette distinction, décernée par le jury du Centre d’art, a été annoncée par l’artiste sur sa page Facebook le 5 janvier dernier.
L’appel à projets du Centre d’art en 2023 a suscité l’intérêt du jury, qui a choisi de revenir sur certains dossiers en 2024. Le projet de Carvens R. Alderson a ainsi retenu leur attention. Sur ses réseaux sociaux, le photographe a partagé son enthousiasme : « C’est avec une grande fierté que je reçois cette mention spéciale… pour un projet qui me passionne depuis longtemps. »
Originaire de Jacmel et ayant grandi à Port-au-Prince, Alderson a suivi une formation en photographie au Centre d’art en 2018, après ses études classiques. Passionné de photographie, Carvens a été bénévole dans le festival Quatre Chemins la même année. Entre juillet et août 2019, il a participé à une formation réalisée par Richard Sénécal sur le film documentaire intitulé « Diversité et tolérance ». Il a continué à explorer l’univers photographique en collaborant avec l’association Kit Média et en travaillant comme photographe au festival Nouvelle Vues Haïti. Ensuite, il a suivi une formation en photojournalisme avec le KOLEKTIF 2 Dimansyon, et depuis 2021, il est photojournaliste professionnel à AyiboPost.
Son projet actuel vise à explorer cinq rituels traditionnels pratiqués dans le Grand Sud afin de mettre en lumière la disparition progressive de ces pratiques, qui participent à la construction de l’identité culturelle haïtienne. « J’ai hâte de partager les résultats de ce travail avec vous », a-t-il confié.
Cette initiative, qui doit s’achever en avril 2025, se concentre sur plusieurs activités culturelles emblématiques. Parmi elles, le « Bal avant quatre », une danse traditionnelle en voie de disparition dans la commune de Bainet. Ce bal, accompagné d’instruments ancestraux, est étroitement lié au vaudou et permet aux esprits (les « loa ») de se manifester lors des rituels.
Une autre pratique mise en avant est le « tir de bâton », une discipline traditionnelle originaire du Grand Sud. Transmise de génération en génération, elle enseigne des techniques de défense tout en canalisant la violence. Considérée comme une forme d’art martial non mortel, cette pratique tend toutefois à disparaître, faute de pratiquants.
Dans le cadre de cette exploration, Alderson prévoit de retourner à Jacmel pour documenter la vénération de « Grann Symba » le 6 février. Cette figure mythique est associée à une grotte mystérieuse appelée « Trou Jet d’Eau », autrefois connue pour ses pouvoirs à résoudre les problèmes des pèlerins. Ce rituel a perdu de son importance avec le temps, notamment en raison d’une organisation déficiente et de résultats perçus comme inefficaces.
Parmi les autres rituels en voie de disparition, le « baptême de bateau », célébré à Belle-Anse pour accueillir les nouveaux navires destinés à la pêche ou au transport, occupe une place particulière. Cette cérémonie est consacrée à « Mèt Agwe », un esprit du vaudou. L’Étang Bossier, près de Jacmel, constitue également un lieu de rites mystiques, notamment pour des cérémonies initiatiques.
Avec ce projet, Carvens R. Alderson aspire à immortaliser des traditions en déclin tout en sensibilisant le public à leur importance pour l’identité culturelle haïtienne.
Par Youbens Cupidon © Chokarella