Kech Mandragora, le slam comme outil d’expression et de lutte

À seulement 21 ans, Kechna Septama, connue sous le nom de scène Kech Mandragora, s’impose comme une figure montante du slam en Haïti. Née le 27 novembre 2003 à Juvenat, un quartier de Port-au-Prince, elle explore la poésie orale pour transformer sa passion en un outil d’expression sociale.

Fille d’un père originaire de Miragoâne et d’une mère de Jérémie, Kech a grandi à Juvenat jusqu’à l’âge de 7 ans avant de déménager à Tabarre. Elle se souvient de ces premières années comme marquées par un environnement familial aimant. « De 2003 à 2010, j’ai été à Juvenat. Par la suite, de 2010 à 2021, j’ai demeuré à Tabarre et, pour l’instant, je suis de retour dans mon quartier natal. Il n’y avait rien de plus excitant que de grandir dans ma famille avec beaucoup d’amour », explique-t-elle.

Après avoir terminé ses études classiques, Kech s’est formée en informatique de base et en carrelage, mais elle aspire à une carrière plus tournée vers l’écriture. « Je ne travaille pas encore. Mais quand j’étais plus jeune, j’ai reçu une formation en informatique et en carrelage, mais je ne les exerce pas pour autant. Pour moi, mon métier, c’est lire et écrire des textes », confie-t-elle.

Kech a découvert son amour pour la lecture durant son adolescence, une période qu’elle associait aux longues heures passées à la bibliothèque. « Ça remonte à l’époque où j’étais encore une adolescente. J’ai découvert mon amour pour la lecture et je passais tout mon temps à la bibliothèque à lire », raconte-t-elle. En 2019, elle franchit une étape importante en découvrant le slam. « J’avais l’habitude de déclamer à l’église. Puis, dans mes recherches, je suis tombée sur le slam. Je suis tombée amoureuse de ce que j’ai découvert et j’ai continué dans ce chemin. »

Pour Kech, le slam est un talent inné, une forme d’art qu’elle a adoptée sans formation formelle. « C’est un talent. Je n’ai pas été à une école pour me former. Je l’ai découvert, je l’aime et je me suis accrochée à lui », dit-elle.

Depuis, Kech utilise le slam comme un moyen de s’exprimer librement et d’aborder des sujets qui lui tiennent à cœur. « Pour moi, le slam, c’est mon moyen de combat. Il me donne la chance et la liberté de me mettre à nu devant mes auditeurs et de leur faire comprendre qu’ils ne sont pas seuls. C’est mon arme », souligne-t-elle.

Sur scène, elle décrit un sentiment de plénitude. « Quand je suis sur la scène, je me sens libre, existante. Je me sens Kech, celle qui fait sentir aux gens mon énergie », explique-t-elle. Parmi les thèmes qui marquent ses textes, l’égalité des genres occupe une place centrale. « Je traite l’égalité des genres dans mes textes parce que c’est très important pour moi. C’est aussi un combat pour le bien-être des gens, surtout les femmes, étant donné que j’aime beaucoup les femmes », affirme-t-elle.

Bien qu’elle ne se définisse pas explicitement comme une poétesse engagée, Kech se sent profondément impliquée dans la lutte pour la liberté et le bien-être des autres. « Je ne sais pas si je suis une poète engagée, mais je suis sûre que je suis impliquée dans la lutte pour la liberté et que le bien-être des gens est l’élément dominant de mes écrits », ajoute-t-elle.

En parallèle, Kech représente la « Fondasyon Timoun Ayiti Demen » et est membre de la compagnie Palto Vanyan, anciennement Twoup Teyat Karako Vanyanpart. Au-delà du slam, elle s’illustre également dans la comédie et le mannequinat. Cependant, elle reconnaît que le slam peine encore à se faire une place en Haïti. « Pour moi, le slam ne peut pas encore s’imposer. Je ne connais vraiment pas la raison, mais c’est comme le rap : ça prendra du temps, mais ça atterrira un jour. »

En 2022, Kech a été contrainte de quitter Tabarre en raison de l’insécurité croissante dans son quartier. Ce déplacement forcé a renforcé son attachement au slam comme exutoire. « Suite à cette situation, j’ai utilisé ma plume pour me libérer et m’exprimer à travers le slam », confie-t-elle.

Aujourd’hui, son parcours et sa détermination témoignent d’une volonté de faire du slam un outil d’impact social et personnel.

Par Gerole Midy © Chokarella

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