Djouley Paul, le parcours d’un pongiste haïtien

Âgé de 26 ans, Djouley Paul est considéré comme un talent exceptionnel au sein de la Fédération Haïtienne de Tennis de Table. Grâce à sa progression constante et à ses nombreux entraînements, il est devenu aujourd’hui coach de tennis de table après une formation de 30 heures, dans le cadre du niveau 1 de l’ITTF Para Table Tennis.

Né à Port-au-Prince, plus précisément à Turgeau, le 21 décembre 1998, Djouley Paul est le troisième d’une fratrie de quatre enfants. Dès son jeune âge, il développe un amour pour le ballon et pratique le football, comme de nombreux garçons de son époque.

C’est en 5ème année fondamentale que Djouley fait la rencontre de Sisley Joseph Justin, surnommé “Lélé”, qui allait bouleverser le cours de sa vie. C’est lui qui lui fait découvrir le tennis de table. “Ma rencontre avec le Tennis de Table reste quelque chose de surprenant. Auparavant je ne savais pas ce que c’était ce jeu de Ping-pong jusqu’à ce que j’ai rencontré un Sisley Joseph que je considère aujourd’hui comme mon père, qui m’a fait découvrir ce jeu. Mais avant j’avais l’habitude de manier des ballons comme jouer au football comme le font les autres jeunes garçons comme moi”, raconte-t-il.

Bien que plus attiré par le football, Djouley décide temporairement de mettre de côté le ping-pong. Mais en 2012, la tragédie frappe lorsqu’il perd son père. Cette perte marque un tournant dans sa vie. “Bien que je n’étais pas stable dans le jeu de Ping-Pong, au moment où j’ai eu une certaine détermination pour le football, j’ai parvenu à décrocher une offre dans la sélection nationale U17 de football. Dommage j’ai laissé passer cette chance en raison du décès de mon père et j’ai décidé de laisser tomber le football et j’ai embrassé le Ping-Pong”, confie-t-il.

Confronté aux difficultés entre études et sport, Djouley choisit de sacrifier ses études pour se concentrer sur le tennis de table. “Pour le Ping-Pong j’ai dû reprendre la classe de 5ème. Je ratais tout le temps des cours pour pouvoir m’entraîner et j’ai échoué lors des examens. Ce que j’avais en tête c’était de pouvoir faire des études tout en pratiquant le sport, mais en Haïti c’est pas du tout possible. Alors je me suis battu jusqu’à ce que j’y sois parvenu. J’ai dit on crée du temps pour ce qu’on aime en réalité. Je jouais dans la matinée et me rendais à l’école dans l’après-midi”, raconte-t-il.

Dans son enfance, Djouley a aussi eu un comportement turbulent, mais l’intervention de Sisley Joseph a été déterminante. “Je n’arrêtais pas de semer le chaos partout. Du coup, les supérieurs étaient obligés de me radier environ 8 fois dans un mois dans le club. Mais par amour pour ce que je faisais, je m’y rendais tout le temps jusqu’à ce que j’ai fini par changer”, explique-t-il.

Le destin n’a pas été plus clément pour Djouley durant ses années secondaires au collège Vision Continentale. Les difficultés familiales et les problèmes socio-économiques l’ont contraint à arrêter ses études, à un moment où il était sur le point de terminer sa terminale. “Je vis avec ma mère, mon frère, ma sœur et mes neveux. Étant donné que je n’ai plus de père et vue la conjoncture du pays, j’ai arrêté mes cours alors que j’étais à deux doigts de franchir le cap de la terminale. J’ai fait tout ça afin de me projeter vers un avenir meilleur pour moi et ma famille”, raconte-t-il.

Pour Djouley, c’est finalement le tennis de table qui prend le relais de son avenir scolaire. Sa première expérience internationale à Saint-Domingue lors d’une compétition Holding lui permet de montrer son talent, et c’est en 2017 qu’il obtient la qualification pour représenter Haïti aux Jeux de la Francophonie en Côte d’Ivoire. “Ce qui allait donner un éclat à ma carrière, c’est que j’étais qualifié en 2017 au jeu de Francophonie à Abidjan en Afrique. Après cette qualification, j’ai eu des offres qui n’ont jamais abouti à leur fin compte tenu du pays dans lequel on vit”, se souvient-il.

Djouley exprime également une grande reconnaissance envers Sisley Joseph, qui a joué un rôle clé dans son parcours. “Ma génération est la première dans l’histoire du Tennis de Table à être qualifiée aux Jeux de Centre-Américains. Une dimension qui n’aurait été atteinte sans lui, et ses collègues Donika Saint-Fleur, Olivier Guerrier, et Rafaël Montero”, précise-t-il.

En plus de ses réalisations en tant que joueur, Djouley a suivi une formation avancée et est devenu coach professionnel. “Je suis coach international, j’ai été diplômé par l’ITTF-Para Table Tennis lors d’une formation. Je peux dire que je suis l’un des meilleurs coachs en Haïti. Je veux aider les jeunes de mon pays, leur transmettre ce que j’ai appris. Je sais qu’ils ne peuvent pas vraiment pratiquer le sport vu la conjoncture du pays, mais je reste confiant que le pays trouvera sa stabilité un jour”, affirme-t-il.

Il ajoute également que “Le Ping-pong est aussi un sport. Souvent, on considère le football comme le numéro 1 des sports, cependant il faudrait qu’il y ait un challenge sinon il ne pourrait y avoir de performance. On doit développer le sport dans le pays. Le ministère du sport doit aussi mettre son grain de sel dans le domaine pour que cela puisse être possible.” Et d’ajouter : “Ma carrière est sensée s’arrêter là, mais avant tout, mon équipe et moi voulons qu’en 2026, Haïti soit qualifiée aux Jeux Centraux-Américains, c’est ça notre rêve.”

Djouley Paul est aujourd’hui l’une des figures emblématiques du tennis de table en Haïti. Ses performances à Saint-Domingue, Cuba, en Guyane Anglaise, et dernièrement à Salvador en 2023, témoignent de son talent. Sa dernière prestation a eu lieu en Haïti lors de la 11e édition du tournoi Haïti Open, qui s’est déroulé à l’Hôtel Royal Oasis les 1er et 2 novembre 2024, avec la participation de 48 athlètes, organisée par la Fédération Haïtienne de Tennis de Table.

Par Gerole Midy © Chokarella

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