La chanteuse canadienne d’origine haïtienne, Rèn Darah, de son vrai nom Nadwine Darah Muscadin, a remporté le prix de la meilleure voix féminine aux Kilimandjaro Music Awards 2024, le 16 novembre, à Toronto. Cette distinction, qui met à l’honneur les talents émergents et confirmés de la scène musicale internationale, marque une étape cruciale dans le parcours de l’artiste.
“Ma candidature a été déposée par Lyky Label. Quand on m’a annoncé que j’étais nominée, c’était un moment de choc et de joie. J’ai crié, j’ai même pleuré ! Et quand j’ai gagné après avoir performé sur la scène des KMA, mon âme a fait un voyage avant de retourner dans mon corps”, confie Rèn Darah dans une interview accordée à Chokarella.
Il s’agit de la première victoire de ce genre dans sa carrière, qu’elle perçoit comme un signe encourageant : “Les distinctions comme celle-ci nous arrêtent sur notre marathon, pour nous rappeler que nous sommes sur la bonne route et que nous faisons la bonne chose.”
Le parcours de Rèn Darah, de son enfance en Haïti à sa consécration actuelle, est marqué par des moments décisifs. C’est à Gatineau, au Québec, à l’école secondaire Mont-Bleu, qu’elle fait ses premiers pas sur scène en 2013. En 2019, elle se consacre entièrement à la musique, après avoir remporté plusieurs concours, dont Secondaire en spectacle et Cégep en spectacle. Depuis, elle multiplie les collaborations, les performances, et les sorties de titres tels que Kado et Freaky Souls. Sa musique, qu’elle qualifie de fusion entre influences afro-caribéennes et R&B, reflète à la fois ses racines haïtiennes et son ouverture à la modernité.
“J’ai décidé de lancer officiellement ma carrière musicale en 2019. Depuis 2019 jusqu’à aujourd’hui, je travaille avec Yohann Doré en tant que producteur ; il m’a accompagnée au studio, il a été mon coach”, a-t-elle révélé à Chokarella.
Rèn Darah a dû surmonter de nombreux défis en tant que femme dans l’industrie musicale. Elle évoque les difficultés rencontrées : “Le plus grand défi auquel je fais face sur mon parcours depuis le début est le fait de me sentir seule sur le chemin. Même avec une équipe, il y a souvent un intérêt financier ou autre, ce qui est normal ; c’est le monde du business”, partage-t-elle. Des tensions familiales s’ajoutent à ces défis : “Autre défi, c’est le fait de ressentir que je suis une honte aux yeux de ma mère. J’ai rejeté la religion pour embrasser ma propre version de la spiritualité, j’ai accepté d’être une femme qui va vivre ses rêves et sa vérité, peu importe les jugements de la société”, dit-elle.
Malgré les obstacles, Rèn Darah persévère et continue de créer. Son parcours musical est nourri des influences qui ont marqué son enfance, du konpa haïtien au gospel, en passant par le R&B et la soul. “Les artistes qui m’inspirent sont ceux qui, d’une façon ou d’une autre, ont cassé les codes musicaux et créatifs de leur époque : Prince, Misty Jean, Selena Quintanilla, Yole Derose, Nina Simone, Rutshelle, Etta James, Phyllisia Ross, Aretha Franklin, Stevie Wonder”, confie-t-elle, soulignant sa quête d’authenticité et de liberté artistique.
Cette reconnaissance aux Kilimandjaro Music Awards n’est qu’une étape pour Rèn Darah. En 2024, elle est également nominée pour les Culturiades, un événement qui célèbre les talents de l’Outaouais. Elle prépare activement son premier concert autoproduit, Mélodies Passionnées, prévu le 11 décembre 2024, et annonce la sortie de son premier album pour 2025. Cet opus, qu’elle décrit comme un subtil mélange de R&B/Soul et de sonorités afro-caribéennes, marquera une nouvelle étape dans sa carrière.
Malgré la pression associée à une telle récompense, l’artiste reste concentrée sur l’essentiel. “Je ne me concentre pas sur la pression que ce prix peut m’apporter, mais sur la pression constante de l’héritage artistique que je laisse dans le monde”, explique-t-elle. Rèn Darah souhaite que sa musique traverse le temps, inspire et éduque, tout en explorant de nouvelles voies artistiques.
En parallèle de sa carrière musicale, Rèn Darah, étudiante en sciences sociales et communication, s’intéresse aussi à l’histoire de l’art et au cinéma documentaire. Elle ambitionne de documenter la contribution positive des Haïtiens à la culture, un projet qu’elle mène avec la même ferveur que ses créations musicales.
Aux fans qui la suivent depuis ses débuts, elle adresse un message de gratitude : “J’aimerais leur dire merci et je compte les rendre fiers en me surpassant en tant qu’artiste.” Aux jeunes artistes, elle conseille de rester authentiques et de garder en tête leur mission : “C’est leur objectif, leur vision qui leur permettront de ne pas abandonner.” Pour découvrir son univers musical, elle donne rendez-vous en décembre pour un concert prometteur en émotions et en surprises.
Par Ravensley Boisrond, éditeur en chef de Chokarella